Alors que le nom de Jean Anouilh s’inscrivait à l’une des premières places au palmarès des auteurs dramatiques, celui-ci se faisait de plus en plus distant vis à vis du monde. « De lui, il n’entend livrer que ses pièces. Là, il est tranquille, elles sont bonnes et en outre elles plaisent. Il les montre avec l’assurance tranquille d’un ingénieur qui expose un moteur éprouvé dans une nouvelle carrosserie. Je connais mon métier dit-il avec cette pointe légère d’accent bordelais qui ensoleille ses propose gris ». Ainsi le décrivait la journaliste Françoise Giroud dans sa suite de portraits du Tout-Paris.
Et lui-même, Jean Anouilh ne disait-t-il pas : « J’ai horreurs des générales et je ne vais qu’aux miennes, bien forcé puisque j’y joue le rôle du taureau ».
Encouragé par son succès de L’Alouette, Jean Anouilh se lança avec allégresse dans l’écriture de son œuvre suivante : Ornifle ou le courant d’air. S’étant inspiré de Molière, Anouilh annonçait ainsi sa pièce : « C’est l’histoire d’un homme qui a décidé que la vie était facile et qui ne prend rien au sérieux. Il n’atteint évidemment aucun résultat et finalement est écrasé par la vie, comme Don Juan, par le commandeur ; c’est d’ailleurs une sorte de don juan qui meurt sans avoir fait autre chose que déplacer de l’air ».
Ornifle
maquette de costume de Jean-Denis Malclès pour Pierre Brasseur
Collections A.R.T.
La distribution fut éblouissante. Au soir de la répétition générale, Pierre Brasseur, Louis de Funès et Jacqueline Maillant furent longuement applaudis. Néanmoins, Jean Anouilh ne paraissait pas entièrement satisfait de son ouvrage et, d’après le critique Gabriel Marcel , il aurait, à plusieurs reprises, retravaillé son texte au cours de représentations. Hélas, ni coupures, ni becquets ne suffiront à faire d’ Ornifle un véritable chef d’œuvre reconnu de tous. Alors que Marc Beigbeder s‘enthousiasmait : « Sans nous avancer sur la question de l’âme humaine, Ornifle est une pièce qui a la sienne, une âme tour à tour insolente et brillante, puis douce et tendre comme un sourire d’enfant » , les journalistes Roger Nimier, Morvan Lebesque, Jean-Jacques Gautier, Roland Laudenbach, réunis dans un débat organisé par l’hebdomadaire Arts se dirent « … impatients qu’Anouilh leur fournissent enfin le théâtre de mœurs et de caractères dont il était capable ».
Ornifle
Pierre Brasseur
(photo George Henri)
Collections A.R.T.
Le Figaro 15 février 1962
A. Dulière Rencontre avec la gloire Éditions Duculot 1959
Les Nouvelles littéraires 12 janvier 1956
Les Nouvelles littéraires 10 novembre 1934